[Un livre - Une filmo] Petit traité d’écomobilité

Sélection réalisée en : mai 2023

Dans le cadre de son partenariat avec les Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM), Autour du 1er mai vous propose la série «  Un livre – Une filmo  », des sélections de films en lien avec la thématique d’ouvrages récemment publiés. En ce mois de mai, ce sont deux filmographies qui sont au programme : la première, ci-dessous, vient illustrer le Petit traité d’écomobilité d’Alexis Fraisse, quand la seconde, que vous trouverez ici, creuse les enjeux soulevés par les autrices Marta Torre-Schaub et Sabine Lavorel dans La justice climatique : prévenir, surmonter et réparer les inégalités liées au changement climatique.

Les deux ouvrages, publiés respectivement les 5 mai et 16 juin 2023, sont à retrouver en librairie. Plus d’informations sur le site des ECLM.

Bon à savoir : les films dont le titre est suivi du signe (*) sont disponibles gratuitement en ligne (le lien est indiqué à la fin de chaque fiche).

La filmographie est également disponible au format pdf ici.

© Les Pédaleurs - Alsace 20

Des voyants planétaires au rouge

Les moyens de transport actuels, par leur variété et leur rapidité, sont aujourd’hui accessibles à tous et nous permettent d’aller régulièrement à l’autre bout du pays, voire du globe. Mais cette mobilité frénétique n’est pas sans incidence pour la planète : elle dégrade la qualité de l’air, accentue la raréfaction des énergies fossiles ou encore conditionne l’élaboration de nos paysages urbains. En 2012, le court métrage d’animation Sans lendemain (*) faisait déjà la démonstration implacable de la déplétion énergétique, des conséquences au niveau planétaire de notre mode d’exploitation des énergies fossiles et des ressources naturelles, ainsi que de l’impasse où nous mène notre modèle de croissance. En adoptant une approche didactique et en s’appuyant sur des exemples concrets, Alexis Fraisse, auteur du Petit traité d’écomobilité, nous invite à remettre en question nos habitudes et nos modes de vie.

Petit tour d’horizon des moteurs d’aujourd’hui

Dans son ouvrage, Alexis Fraisse décrypte le fonctionnement des moteurs thermiques, gourmands en énergie et aux rendements finalement très discutables. Mais il s’intéresse aussi au fonctionnement des véhicules hybrides, sans y voir pour autant une solution. C’est la conclusion à laquelle aboutit également l’enquête menée par Quentin Noirfalisse et Arnaud Zajtman dans Cobalt, l’envers du rêve électrique (*) (2022) ou celle menée par Guillaume Pitron et Jean-Louis Pérez pour La Face cachée des énergies vertes (*) (2020). Les deux documentaires d’investigation remettent en cause la promesse d’une transition écologique propre portée par la voiture électrique en révélant le prix qu’elle fait peser sur la planète. Ne négligeant aucun des effets pervers de cette technologie dite «  verte  » – et pourtant polluante –, ils démontrent que les pays occidentaux ont troqué leur dépendance au pétrole contre une addiction aux métaux (rares ou conventionnels), un choix qui se révèle déjà coûteux sur le plan économique, humain et environnemental.

Les pistes à emprunter

Après avoir dévoilé les mirages, fantasmes et autres fausses promesses, Fraisse insiste sur la nécessité d’utiliser des véhicules sobres, efficaces et dimensionnés pour nos besoins réels. Du côté des voies terrestres, il tire les leçons du modèle de transport vertueux qu’est le train (ce dont étaient convaincus les citoyens militants du film Le Train de leurs rêves (*) (2021), lorsqu’ils ont créé la coopérative ferroviaire Railcoop afin de rouvrir la ligne Bordeaux-Lyon, abandonnée par la SNCF en 2014). Il énumère les nombreuses possibilités de déplacements sur des véhicules légers, comme le vélo, pour les petits et moyens trajets. Le documentaire Les Pédaleurs, réalisé par Jérémie Gentais et Matthieu Leclerc (2016), en est l’illustration parfaite à l’échelle de la ville de Strasbourg : explorant le lien fort qui unit des cyclistes à leurs deux roues, il montre comment la capitale de la région Grand Est a su faire émerger une véritable culture vélo.

Là où Le Tarmac est dans le pré (2013) pointe les dégâts environnementaux irréversibles qu’entrainerait la construction d’un «  super  » aéroport à Notre-Dame-des-Landes (le second de la région nantaise et un serpent de mer devenu, au bout de cinquante ans de lutte, le symbole d’un projet inutile imposé par le pouvoir), Alexis Fraisse explore dans son ouvrage les vertus d’autres voies aériennes, comme les planeurs et les aérostats, et analyse, du côté maritime, les déplacements à la voile en vitesse modérée. On pense ici à Chocotopie. Derrière le cacao, la graine d’un changement de Lucie Franco et Gaspard Lescure (2022), dans lequel une productrice de République dominicaine s’allie à des marins bretons afin qu’ils transportent son cacao à la voile. En suivant le voyage d’une fève à travers l’océan, ce documentaire inspirant révèle les enjeux de tout un système et les initiatives déjà prêtes à le révolutionner. Mais on pense aussi, bien sûr, à I am Greta (2021), le documentaire de Nathan Grossman consacré à Greta Thunberg, dont la séquence finale confirme la détermination sans faille de la jeune militante écologiste suédoise : devant aller à New York pour participer au sommet de l’ONU sur le climat, elle choisit de s’y rendre à bord d’un voilier zéro carbone.

Fraisse rappelle que tous ces transports du futur ne nécessitent aucune hypothétique et hasardeuse rupture technologique. Ils ne font qu’utiliser des ressources et des connaissances que nous maîtrisons déjà relativement bien (à l’instar de celles mobilisées dans Pour une paysannerie sans pétrole (*) (2023), un reportage de Télémillevaches qui invite à descendre du tracteur et à arrêter le pétrole en remettant au goût du jour la traction animale). Des pistes qui pourraient être envisagées sans attendre pour un avenir plus sobre et plus raisonné… et face auxquelles on ne peut s’empêcher de se dire que, finalement, dans la lutte qui s’est jouée à Notre-Dame-des-Landes entre deux modèles de développement et de croissance radicalement opposés, c’étaient décidément les habitant·es de la ZAD qui semblaient avoir le plus les Pieds sur terre (2017)  !