Affiche du film

On nous appelait Beurettes

Un film de Bouchera Azzouz

 2018  France  Documentaire  Prise de vue réelle  52 mn  Couleur  Mode de production : Télévision

 Scénario : Bouchera Azzouz

Producteur :
Distributeur :

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Dernière mise à jour : 3 juillet 2019

Elles s’appellent Dalila, Aourdia ou Mina. Elles ont entre 45 et 50 ans et ont toutes grandi dans le même quartier de Bobigny, celui de l’Amitié, au début des années 70. On connaît bien l’histoire de leurs frères, les « Beurs », largement médiatisée. Mais les filles ? Le quartier de l’amitié, c’est aussi le quartier de la réalisatrice et narratrice du film, Bouchera Azzouz. Elles appelaient leurs mères les « daronnes ». La société allait, dans les années 80, les enfermer, elles, sous l’étiquette de « beurettes », féminin de « Beurs », mot dérivé du verlan pour dire « Rebeu », donc Arabes.

Elles font partie de cette génération qui a vu naître les quartiers et qui va être confrontée de plein fouet à la problématique de l’intégration. Ce sont elles qui ont essuyé les plâtres d’une tentative d’un premier « vivre-ensemble », elles qui sont allées pour la première fois à l’école française mais qui ont connu les vacances d’été au bled et l’écartèlement plus ou moins douloureux entre deux cultures. Le mariage forcé n’était pas un mythe mais bien, pour beaucoup, comme Mina, une dure réalité. Car les Beurettes ont dû non seulement gagner le droit d’être pleinement citoyennes en tant que personnes issues de l’immigration mais aussi en tant que femmes : dans la douleur, il leur faudra faire évoluer les mentalités au sein de leurs propres familles, où les traditions pèsent lourd sur leur destin de femmes.

Mais leur histoire est aussi celle d’une génération qui a bénéficié d’une dynamique d’éducation populaire encore très active à l’époque. L’école de la République, bien sûr, a joué un rôle déterminant, mais nos personnages ont aussi profité des mêmes patronages, des mêmes colonies de vacances que les petits Français, et surtout, de la dynamique de solidarité propre aux fameuses « banlieues rouges », qui, dans les années 80, au moment de leur adolescence, connaîtra son chant du cygne. Enfin, c’est la génération des Beurs et Beurettes devenue adulte, qui a vu apparaître la montée de l’Islam des « frérots », issu de la mouvance des Frères musulmans. Ce sont donc des enjeux encore largement d’actualité : « émancipation », « intégration », « identité », « égalité », qui traversent le film. Car raconter le parcours de Beurettes, c’est raconter aussi en filigrane le passage d’une société à une autre. Comment est-on passé de la question de l’intégration à la question identitaire qui définit aujourd’hui une nouvelle génération de jeunes nés français et qui n’ont pas connu d’autre culture que la culture urbaine des quartiers ? Comment est-on passé de l’éducation populaire encadrée par les municipalités communistes aux politiques de la ville mises en place avec le retour de la gauche au pouvoir ? Comment est-on passé d’un Islam modéré, vécu comme une quête de spiritualité dans l’intimité des foyers, à un Islam radical, très politique, qui voudrait désormais s’afficher de façon ostentatoire dans tous les domaines de la vie, y compris dans la sphère publique ? Le film veut mettre en valeur les combats des Beurettes et promouvoir leur histoire pour offrir une alternative aux jeunes et en particulier aux jeunes filles des quartiers populaires. Elles sont les héritières de ces luttes, faut-il encore que ces histoires soient racontées si on veut leur en faire prendre conscience.

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